Bois du pontois

Localisé sur la colline, face au château de La Roche-Maurice, vers le sud, le lieu-dit du Bois du Pontois a une riche histoire dont les premières traces d’habitations remontent à la Préhistoire.

Situé sur la rive gauche de l’Élorn, près de l’ancienne voie royale menant de Brest à Paris et en bordure de la « vieille route de La Roche-Maurice » conduisant de Landerneau au bourg, le Bois du Pontois, bien que privé est accessible au public et comprend de nombreux trésors, seul le manoir n’est pas visitable.

Le bois durant la Préhistoire

On trouve dans le Bois du Pontois des traces d’occupation caractéristiques de la fin du Paléolithique. En effet, un rocher placé en surplomb par rapport aux autres correspondrait à un abri sous roche de chasseurs-cueilleurs. Ces hommes se déplaçaient d’un endroit à un autre en vivant des ressources de la chasse, de la pêche ou encore de la cueillette. Étant nomades, les quelques chasseurs-cueilleurs n’ont dû occuper que de manière ponctuelle ce campement. À noter que la végétation était peu arborée : la plaine de la rade de Brest, couverte d’herbes, était parcourue par des troupeaux d’animaux sauvages.

Un parallèle peut être fait avec le Rocher de l’Impératrice à Plougastel-Daoulas, une commune à une quinzaine de kilomètres à l’ouest de La Roche-Maurice, où un abri sous roche, dominant l’estuaire de l’Élorn, a certainement été un petit camp de chasseurs il y a environ 14 000 ans. 

L’abri sous roche se situe dans un affleurement de quartzite, un minérai prisé au Paléolithique, en prolongement de celui de Plougastel-Daoulas, ce qui peut expliquer la parenté entre les deux sites.

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L’abri sous roche du Bois du Pontois, septembre 2022 - Crédits : Odeline CHERON.

LE BOIS ENTRE LE XVe ET LE XVIIIe SIÈCLES

Armoiries d’azur à la fasce d’or, surmonté de deux croissants de même.

Les habitants du domaine

La famille Le Pontois serait la première famille détentrice du domaine dont le centre était un manoir, plus tard transformé en château. Cette famille modeste n’apparaît ni dans la réformation de la noblesse de 1426 ni dans celle de 1668. Cependant, dans le deuxième tome du Nobiliaire et Armorial de Bretagne, Pol Potier de Courcy mentionne la famille du Pontois. Cette famille a des armoiries « d’azur à la fasce d’or, surmonté de deux croissants de même ».

Guillaume Le Pontois, sieur du Pontois et du Beauchesnay (ou du Boischêne) marié à Catherine Mahieu, est le premier propriétaire attesté du domaine. Il est procureur fiscal de Landivisiau, c’est-à-dire qu’il fait partie des officiers de la seigneurie de Léon. En 1660, il offre 1000 livres au profit des pauvres et compte parmi les fondateurs de l’hôpital de Landerneau. Il décède en 1663. 

La chapelle Saint-Guillaume

La chapelle dédiée à Saint Guillaume aurait été érigée par le Seigneur Guillaume Le Pontois qui y marie deux de ses filles, en 1657 et 1661, et y aurait baptisé deux petites filles en 1670 et 1673. 

Bâtie sur un affleurement rocheux de quartzite, cette chapelle domine d’environ douze mètres le sentier nord et apparaît sur de vieilles gravures représentant le château.

En 1804, elle est inventoriée comme « chapelle du Ponthoy ». Elle est par la suite déclarée comme détruite notamment dans le Répertoire des églises et chapelles du diocèse de Quimper et de Léon de René Couffon et Alfred le Bars.

De cette chapelle privée construite partiellement en pierre de Logonna que l’on a fait venir de plusieurs kilomètres, il ne reste que des ruines. L’entrée se fait par les quelques marches situées côté sud de la chapelle, le mur sud et le mur nord reçoivent, quant à eux, chacun une baie ; enfin, l’autel est érigé contre le mur est. Une niche demeure visible en hauteur sur la façade ouest et à ses pieds, des restes de la niche de la chapelle jonchent le sol.

L’entrée de la chapelle Saint-Guillaume - Crédits : Odeline CHERON.
Les vestiges de la partie supérieure de la niche de la chapelle - Crédits : Odeline CHERON.

Le bois comme jardin d'agrément

Le Bois du Pontois est désigné sur la base Mérimée sous le nom de « Jardin d’agrément du château de Pontois ». Cette fiche a été rédigée en 2001, après une enquête en 1992, dans le cadre d’un pré-inventaire par Jacques de Gésincourt. On y mentionne les années 1766 et 1830 comme celles des campagnes d’aménagement du jardin. Elle liste aussi quelques éléments constituants du bois : un rocher artificiel, des grottes naturelles et artificielles ainsi qu’un bassin.

De chaque côté du chemin menant à la chapelle se dressent deux cahutes de pierre d’environ trois mètres de haut, partiellement recouvertes de terre. Comme l’indique la fiche citée précédemment, il s’agit de grottes artificielles. Dans les textes retrouvés sur les « folies de jardin », on lit que beaucoup d’entre elles étaient ornées de coquillages. C’est le cas de la grotte de droite.

Une des deux grottes, la plus au nord du sentier - Crédits : Odeline CHERON.
Le parement en coquillage de la cahute nord - Crédits : Odeline CHERON.

Le bois au XIXe siècle

Les grottes

Le bois abrite deux grottes dont celle la plus à l’ouest est dédiée à Sainte Hélène et celle la plus à l’est est dédiée à la Vierge. Cette dernière serait une réplique de la grotte de Lourdes ou Grotte de Massabielle dans laquelle Bernadette Soubirous aurait connu 18 apparitions de la Vierge Marie en 1858. Sa présence au Pontois n’est pas étonnante lorsque l’on sait que la reproduction de grottes de Lourdes a été un réel phénomène en France au XIXe siècle.

Toutes deux sont situées dans l’affleurement de quartzite en contrebas de la chapelle Saint-Guillaume. Des canalisations en plomb alimentaient la fontaine miraculeuse. Dans un replat de la grotte, un bout de métal témoigne encore de la présence d’une statue.

Carte postale figurant la “grotte de Lourdes” - Coll. privée.
Les restes de la fontaine miraculeuse - Crédits : Odeline CHERON.
Carte postale figurant la grotte de sainte Hélène - Coll. privée.
Morceau de fer de l’ancienne statue - Crédits : Christiane ABIVEN.

Le bois et la seconde guerre mondiale

Une occupation allemande

En juin 1940, durant la Seconde Guerre mondiale, un détachement de l’armée allemande, venu de Sizun en direction de Brest, arrive par la D764. Un camion citerne en feu bloque l’entrée de Landerneau au niveau du pont du chemin de fer. Les hommes sont contraints de s’arrêter quelques jours à La Roche-Maurice et, plus précisément, dans la ferme et le bois du Pontois.

Au début de l’année 1941, des soldats allemands se présentent à nouveau au bois du Pontois. Ils ne sont pas seuls : environ 800 belges et hollandais arrivent avec eux. Ils sont recrutés pour la construction du Mur Atlantique. Chaque soir, après leur journée de travail, ils viennent passer la nuit à l’abri du Bois.

Pour organiser leurs déplacements quotidiens, des emplacements pour cars sont aménagés à la place de l’actuel sentier piéton.

Une quarantaine de baraquements ont été construits dans 2 endroits distincts : au nord, le long du sentier piétonnier, ils abritaient les travailleurs belges et hollandais. Au sud, entre la stèle et le Morbic, ils abritaient des marins de la Kriegsmarine, puis, en 1944, lors de la déroute, des SS. Les emplacements sont redevenus des bois.

Les hommes sont autonomes en eau et ils ont pavé le chemin depuis la route jusqu’au baraquement. L’accès au bois est surveillé grâce à une guérite qui aurait été construite en juillet 1944.

Au total, durant la Seconde Guerre mondiale, près d’un millier de personnes vivent dans le bois du Pontois. À la même époque, il y a environ le même nombre d’habitants à La Roche-Maurice. La commune a donc doublé en termes de population.

Le bois du Pontois n’est pas le seul bois de France occupé par l’armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Les bois ont un grand intérêt : ils permettent de cacher la présence de soldats sur le territoire et d’éviter les bombardements. Malgré tout, à La Roche-Maurice, beaucoup d’arbres sont abattus afin de permettre la construction des différents lieux de vie au sein du bois.

 

 

La stèle des fusillés - Crédits : Odeline CHERON.

La stèle commémorative des fusillés

Une stèle commémorative a été érigée au sein du Bois du Pontois en mémoire des 6 hommes assassinés en 1944 par les troupes de la Wehrmacht qui s’y sont repliés. Agés de 19 à 29 ans, ils font partie d’un groupe de résistants de Douarnenez et sont trahis, emprisonnés puis conduits dans le bois afin d’être tués. Beaucoup de rumeurs circulent à propos de leur mort. Néanmoins, aucune trace de torture n’a été retrouvée sur les corps. Cependant, leurs mains sont liées dans leur dos par du fil de fer comme l’explique Joseph Abiven dans son témoignage que vous pouvez retrouver au bas de cette page.

Les six noms et prénoms des résistants assassinés sont gravés dans la pierre. Plusieurs mois après leur mort, un septième corps est retrouvé : il s’agit d’un ouvrier agricole. Son nom est ajouté au bas de la stèle.

Le témoignage de Joseph ABIVEN

L’Association Château et Patrimoine Rochois remercie Joseph Abiven pour son témoignage émouvant et sa fille, Christiane Abiven, de nous avoir autorisé à publier son récit.

Résistants du bois du pontois

« J’ai été témoin de ces faits. Fin juillet 1944, un soldat allemand nous a annoncé qu’il y avait un cimetière de terroristes dans le bois du Pontois.

Sitôt leur repli sur Brest début août, nous avons fouillé : les Allemands avaient creusé une vingtaine de casemates toutes recouvertes de troncs d’arbres ; cependant, une casemate avait été remblayée. Là se trouvaient les corps de 6 patriotes, 3 de la commune de Kerlaz, 3 de celle de Ploaré, près de Douarnenez, empilés les uns sur les autres à l’endroit même où à été édifiée la stèle. Ils étaient en tenue de travail (bleu de chauffe).

La date de leur décès, 31 juillet, est, je pense, approximative. Ont-ils été tués au Pontois ? Certains Rochois les ont, paraît-il, entendu crier. L’exhumation a eu lieu 6 à 7 jours après leur décès. Je les ai transportés en charrette, à cheval, enveloppés dans des bâches de camions, au cimetière pour une sépulture provisoire, près du monument aux morts. La population Rochoise était rassemblée au bourg pour accueillir les dépouilles, tandis que flottait sur le vieux château le drapeau tricolore…
Les journaux ayant cessé de paraître au moment de la débâcle allemande, il a fallu attendre leur réapparition quelques jours plus tard afin d’y faire paraître un communiqué invitant les familles à venir reconnaître les corps.
Des morceaux de vêtements ayant été prélevés sur chacun, nous n’avons décelé aucune mutilation sur les corps, pas d’œil arraché, ni de trace de balles. Par contre, tous avaient les mains liées derrière le dos avec des fils de fer…

Ils appartenaient tous les 6 à un réseau de résistance ; l’un d’entre eux avait, paraît-il, lié amitié avec un alsacien mobilisé dans la Wehrmacht. Celui-ci les a dénoncés ; ils étaient tous porteurs d’un demi billet de 5 francs, preuve de leur appartenance aux réseaux.

Deux mois après le départ de la troupe allemande, une personne âgée, ramassant du bois mort au bois du Pontois, eut la désagréable surprise de découvrir, dans une tranchée, un 7ecadavre. Celui-ci, un ouvrier agricole de Pleyber-Christ, âgé de 62 ans, avait été réquisitionné avec son attelage pour replier la troupe sur Brest. Ce dernier a été abattu d’une balle dans la tête.

Je rappelle qu’au bois du Pontois, ces atrocités ont été commises là où la Kriegsmarine avait édifié des baraquements qui, en ce temps, hébergeaient une partie des marins allemands des cuirassés basés quelque temps à Brest. »

Joseph Abiven

Le bois après la seconde guerre mondiale

Morceau de poêle pour chauffer les baraques - Crédits : Odeline CHERON.

L'OCCUPATION DU BOIS

À la fin de la guerre, les baraques sont démontées et transportées à Brest pour servir de logement aux Brestois sinistrés suite aux bombardements. Cependant, le bois ne se retrouve pas complètement déserté. Selon une étude de l’INSEE et un recensement de 1946, 18 habitants composant 8 ménages logent dans le Bois du Pontois. En effet, deux cabanes ont été démontées environ 15 ans après le conflit et ont hébergé quelques rochois.

Le bois du Pontois a conservé des traces et notamment des objets de la vie quotidienne des soldats de cette période : des latrines, des pièces et des boutons ont été retrouvés et il est toujours possible d’observer un morceau de poêle qui pourrait avoir servi à chauffer les baraques ainsi qu’à plusieurs endroits des pièces de maçonnerie en brique provenant d’anciennes casemates dans toute la partie occupée par les allemands.

Julot, l’homme des bois

En 1940, un régiment de chasseurs alpin en attente d’embarquer pour la Norvège fait halte dans le bois pendant une dizaine de jours. Parmi eux, il y a un jeune italien naturalisé français, Giulio Peruzotti. Après la guerre, dans les années 1950, Giulio retourne à La Roche-Maurice pour travailler comme menuisier. Il a d’abord vécu dans les anciennes baraques allemandes puis, après leur destruction, à côté de la menuiserie avant de finalement s’installer dans le Bois. Il aurait fait de l’abri sous roche du bois sa cuisine en y alimentant un feu en hiver. On trouve un peu plus loin deux grosses pierres formant une sorte de « tente rocheuse » dont Julot se sert de chambre. Pour les rochois, Julot est « l’homme des bois ». On relate qu’en plus de ce qu’il cueille, il mange de la viande faisandée cuite au vin et chasse les animaux du bois, comme les serpents qu’il pend aux arbres en attendant de les déguster.

Au début des années 1960, Julot est hospitalisé mais revient quand même tous les dimanches au Bois. Et c’est un jour en s’y rendant qu’il est mort, écrasé par une voiture.

La « chambre à coucher » de Giulio PERUZOTTI- Crédits : Odeline CHERON.

Le patrimoine naturel

Hyménophylle de Tunbridge - Crédits : Projet Tutoré

Le bois abrite de nombreuses espèces, aussi bien minérales, végétales, qu’animales.

La roche principale que l’on trouve dans le bois est le quartzite. L’aspect principal des rochers de quartzite du bois est surtout l’empilement sous forme de chaos.  Présent à plusieurs endroits sous forme de belvédères,  ces chaos ont pour certains été aménagés par l’homme, sans doute à l’époque de la création du jardin d’agrément, pour permettre une meilleure vue sur des sites remarquables, notamment le vieux château de La Roche. 

Le quartzite est l’habitat de mousses et de fougères. Trois types de fougères remarquables protégées au niveau national sont présents :  le dryoptéris atlantique, l’hyménophylle de Tunbridge et le trichomanès élégant.

La strate arbustive du bois est massivement composée de rhododendrons, qui se propagent par marcottage.

La strate arborée est composée principalement de sapins pectinés et de hêtres. Les autres feuillus sont moins répandus tout en étant nombreux et variés. On a recensé 37 espèces d’arbres et arbustes.

En plus de la flore, le bois est riche d’une faune composée de renards, blaireaux, écureuils, lièvres, chevreuils, sangliers, mais aussi d’escargots de Quimper ou encore d’insectes trouvant refuge dans des «chandelles» faisant office d’hôtel. 

Remerciement

Nous tenons à remercier sincèrement Christiane Abiven de nous avoir fourni quasiment l’entièreté des informations, qui précèdent, lors de la visite de son domaine.

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